Madame Cordier était aussi un personnage familier. On ne connait cette cousine très proche de ma grand-mère, que sous le nom de son mari, sans doute parce qu’elle avait le même nom de jeune-fille qu’elle : Augusta Tremelet. Elle avait beaucoup de gouaille et disait souvent quand on lui demandait son avis :
« Moi, je m’en fous, pourvu que mes cheveux y frisent ! »
Elle s’était mariée en 1907 avec Camille Cordier, son voisin de palier, un mécanicien-dentiste, militaire de la réserve, avec qui elle avait eu deux fils Francis et Jean. Ce dernier s’est ensuite tragiquement suicidé avec un pistolet dans son lit sous l’édredon, pour une simple histoire d’amour !
Madame Cordier était une femme coquette et relativement aisée. Je me souviens être allé chez elle une fois ou deux à Toulon au 7 Bd de Strasbourg sur le Champ-de-Mars, dans l’appartement en étage d’un immeuble cossu. J’ai un vague souvenir du salon couvert de beaux tapis et de vitrines pleines de vaisselle en argent étincelant. Quand nous l’avons connue, elle était déjà veuve et âgée. Elle ne pouvait plus porter de talons hauts et se plaignait toujours de ses souliers sans talons, qu’elle qualifiait très poétiquement d’écrase-merdes !
Bernard se souvient qu’elle était venue une année avec eux, lors de sa cure annuelle à Luchon. Elle était restée dans un magnifique hôtel quatre-étoiles, alors que ma mère avait réservé pour eux deux une chambre toute simple dans une pension de famille comme d’habitude.
En été quand elle venait passer deux ou trois jours à la campagne des Moulières, elle dormait avec ma grand-mère dans le grand lit et Marino dormait alors sur un petit matelas par terre.


NB : Clin d’oeil de l’histoire, le 6 Juillet 1889, se célébrait à Paris 20ième le mariage entre un Léon Jean Cordier et une Félicitée Sophie Tremelet. Aucun lien connu avec les nôtres, sauf que l’on sait que l’origine des Tremelet à Toulon date de 1845 environ en provenance de la région parisienne (Corbeil-Essonnes). Troublant, non ?