Quand on regarde la branche des Papel de l’arbre généalogique, on voit que tous ces aïeux (directs et cousins) jusque vers 1850 étaient des cultivateurs, et que leurs enfants sont ensuite brusquement et massivement devenus mineurs de charbon.

Cette mutation a très probablement été provoquée en 1856 par une maladie du ver à soie, la pébrine, qui a entraîné la chute de la principale activité agricole de la région : la culture du murier et « l’éducation » du ver à soie.
De plus vers 1870, l’apparition de la maladie de l’encre sur les châtaigneraies tua de très nombreux arbres en peu de temps.
Enfin, l’ouverture massive de mines de charbon qui coïncidait avec la révolution industrielle, entraîna un désintéressement progressif de la châtaigne et du châtaignier.
Si la maladie de l’encre eut des conséquences claires, elle bénéficia cependant aux usines à tanins qui achetèrent alors à bas prix les arbres morts pour les transformer.
L’ouverture des mines eut un effet plus caché : l’apparition massive de la pomme de terre dans les assiettes, sans doute apportée par des mineurs fraichement débarqués dans la région, supplanta progressivement la châtaigne car elle était plus simple et plus rapide à cultiver, tout en permettant de nourrir toute la famille toujours à bas coût.
On peut supposer que nos ancêtres ont alors plus ou moins été obligés de quitter leurs terres agricoles et de se faire embaucher comme mineurs.
Les actes d’état civil mentionnent que nos ancêtres directs ont toujours vécu dans le lieu-dit Mas de Lascous. Ce Mas situé près de La Grand-Combe, se résume en fait à un ensemble d’une quinzaine de maisons (en ruines actuellement) dans le vallon escarpé d’un petit ruisseau. Certaines étaient regroupées (lot 568 du cadastre Napoléonien), d’autres étaient un peu plus à l’écart. Elles étaient habitées par un petit nombre de familles d’agriculteurs. Les terres alentour, qu’ils exploitaient sans doute en commun, étaient principalement constituées de restanques (les faïsses) et étaient très probablement plantées de châtaigniers et de mûriers. La sériculture devait être pratiquée à petite échelle dans certaines pièces des maisons. Les châtaignes devaient également être moulues artisanalement sur place pour faire de la farine, puis du pain. Ils devaient revendre les cocons et les surplus de farine sur le marché de Laval.
Ces maisons s’égrènent le long d’un sentier qui descend de la chapelle de Saint-Andéol de Trouillhas, jusqu’au Mazel. Le Mas des Oules où vivait la famille Gazay, a sûrement été détruit lors de la construction du puits des Oules, près du hameau du Mazel. Le hameau de Cadacut où vivaient des cousins Papel, a été entièrement rasé par la mine à ciel ouvert qui a défiguré tout le vallon.

Parmi les nombreux frères et sœurs Papel (tous agriculteurs) de la génération au-dessus de Jean-Vincent, nés à Lascous, seuls quelques-uns devaient vivre dans les 3 ou 4 maisons du Mas, les autres s’étant éparpillés au gré des mariages, à Saint-Andéol, Cadacut ou plus loin.
Une des cousines germaines de Jean-Vincent, Mélanie-Précille, se marie en 1880 à Laval avec le séduisant Cyprien Roumestant. Leur lignée aboutira à Emile notre cher curé de Fourques.
Bernard se souvient que le curé disait que depuis la maison du Mas de Lascous de ses grands-parents (Marie-Agathe Roumestant / Clovis Toulouse), ils voyaient la maison des Papel...
Le recensement de 1876 est précieux.
Il montre que 15 familles (soit 70 personnes) vivaient alors dans le « Mas de Lascous ». On y retrouve les noms qui se sont souvent croisés par mariage au cours des décennies : Papel, Dumazert, Cabanel, Dautun, Marcy, Roumestant, Toulouse, Nougaret, Méjean…
Déjà à cette époque, 6 des familles vivaient de la mine, les autres étant restés cultivateurs, bucheron ou garde-champêtre. Il y avait aussi 3 ouvriers-terrassiers italiens.
Dix ans plus tard, le recensement de 1886 ne mentionne plus personne au Mas de Lascous.
Avec le déclin de la sériculture et la montée en puissance des mines, les maisons ont donc été progressivement désertées, laissant les ronces envahir les faïsses à la place des muriers et des châtaigniers. En effet, quand ils deviennent mineurs, nos aïeux sont alors logés par la Compagnie minière, dans de grands bâtiments près des puits où cohabitent plusieurs dizaines de familles.
A partir de 1830 le visionnaire Paulin Talabot démarre la construction d’une ligne de chemin de fer entre la Grand-Combe et Marseille puis Toulon pour alimenter en charbon les nouveaux bateaux à vapeur. La maladie du ver à soie ayant déjà affecté son activité d’agriculteur, Jean-Vincent Papel se fait embaucher comme machiniste de trains à Nîmes vers 1850.

Par cet acte notarié d’Aout 1849, Jean-Vincent Papel vend la pièce de terrain qu’il cultivait, à Rose Dumazert, mariée à Antoine-3 Cabanel, quand ils déménagent pour aller s’installer à Nîmes où Jean-Vincent vient de trouver un emploi de machiniste du chemin de fer. Comme ce terrain est enclavé, l’acte précise que la vente inclut aussi le droit de passage à travers les autres terrains du Mas. Jean-François Papel, le garde-champêtre, est également mentionné dans l’acte de vente comme occupant du Mas. Jean Papel, lui, est dit vivre à Saint-Andéol.
L’acte sous-entend que les occupants du « Mas » cultivent de nombreuses pièces de terrain, et que celle ici-vendue se nomme « La Vigne Vieille ».
Il est curieux de voir que cet achat a été fait par Rose avec son nom de jeune-fille. Elle devait déjà vivre dans ce mas et a acheté cette terre supplémentaire pour leurs enfants.
Antoine-3 Cabanel, agriculteur, mourra au Mas de Lascous en 1857 à 52 ans.
Le recensement de 1876 mentionne que Rose vivait alors toujours dans cette maison, avec leur fils Antoine-4, le quatrième du nom, sa femme et ses six enfants, ainsi qu’avec leur deuxième fils, Adrien, idiot de naissance.
Rose Dumazert y mourra en 1879 à 76 ans.

On a retrouvé dans les papiers de la grand-mère Augusta, une liste précieuse des terrains et maisons dont Aimé Papel a hérité de son père Fernand-Marius. Cette liste fait en particulier référence aux numéros de parcelles du Cadastre Napoléonien en vigueur à l’époque. Comme en 1849 Jean-Vincent n’avait vendu que son terrain mais pas son habitation, celle-ci figure toujours bien dans la liste sous le numéro 568, qui correspond au Mas de Lascous lui-même. On peut donc affirmer que le berceau de la branche des Papel dont nous sommes directement issus se trouve là !